Limonov entre fiction et réalité

Aujourd’hui, Martine vous fait la lecture. Au programme ? Limonov, le dernier roman d’Emmanuel Carrère. Il est l’un des livres qui ont marqué 2011. Ce « roman » devant lequel vous êtes passé 100 fois sans le voir, vaut le détour. Basé sur la vie d’Edgard Limonov, un contestataire russe, il va au delà des genres pour engloutir le lecteur.

Quand un auteur français rencontre un « voyou d’Ukraine ; idole de l’underground soviétique sous Brejnev ; clochard, puis valet de chambre d’un milliardaire à Manhattan ; écrivain branché à Paris ; soldat perdu dans les guerres des Balkans ; et maintenant, […] vieux chef charismatique d’un parti de jeunes desperados », ça fait des étincelles. Et de ce choc est né Limonov, le dernier roman d’Emmanuel Carrère.

Roman, c’est peut-être beaucoup dire. Basé sur la vie d’Edouard Limonov, la biographie de cet homme est tellement fantasmagorique que le lecteur a du mal à croire qu’il n’y a pas une part de romance… Entre l’aventure picaresque, le témoignage journalistique et l’autobiographie, le roman d’Emmanuel Carrère associe les styles et les genres pour rendre compte d’une époque.

Si la révolte m’était contée

Limonov est un personnage qui ne peut laisser indifférent. Oui, il existe et oui, le livre n’est pas une fiction. Mais la part belle est donnée au romanesque et au style lyrique d’Emmanuel Carrère. il incarne la révolte. Pas celle au sens de Camus mais celle inscrite dans les gènes. La rage primaire. Quoiqu’il ait pu faire, Limonov serait arrivé là où il est aujourd’hui. Ses mots, la violence qu’il fait subir à lui-même et aux autres, son esprit de contradiction et sa foi absolue en ce qu’il croit attirent irrémédiablement le lecteur.

Un voyage initiatique

Au-delà de la vie héroïque de ce prisonnier politique, c’est l’histoire de la Russie que retrace l’auteur. A la fois glaciale dans les cœurs et dans les températures, à la fois dangereuse et sauvage, la Russie est une drogue. Tous les personnages veulent la quitter et la fuir mais ils sont terriblement malheureux sans elle. Même les riches immigrés aux Etats-Unis ne peuvent vivre qu’entre eux, en parlant d’eux. En russe bien sûr.
Traverser l’Ukraine, la Tchétchénie, New-York ou encore Paris en un seul livre, ce n’est pas banal. Entre clochard aux Etats-Unis, journaliste et jeune délinquant, Limonov a vécu de multiples vies. Qui sont autant de chapitres. Peut-être est-ce là le seul défaut du livre ? Sa fascination pour un personnage – réel et fictif- reste contestable.

Pauline Amiel

J Egar, l’homme aux secrets

J. Edgar est LA sortie cinéma du mois. Une plongée fascinante dans les tréfonds des États-Unis, à travers le regard de Hoover. Clint Eastwood chuchote à l’oreille du spectateur la face cachée de l’histoire américaine. Le déni et les tabous du FBI comme personne ne les a jamais vus.

J Edgar sous les traits de Leonardo Dicaprio

« L’homme aux secrets ». Ça aurait pu être le titre du nouveau Clint Eastwood. J. Edgar transporte le spectateur derrière la face cachée des mystères d’État. Du meurtre de Charles Lindbergh Junior aux écoutes téléphoniques illégales, la construction du FBI est décryptée par le réalisateur. Porté par un Leonardo Dicaprio transfiguré et impressionnant, le film pose les questions justes sur les secrets d’état.

Rongé par l’ambition, la paranoïa et la vengeance, J. Edgar Hoover a transformé la face du monde. Entre Janus et docteur Jeckill, le haut fonctionnaire a l’image carrée se révèle dans le film  être un homme complexe. Un régal de psychologues.

Un petit secret pour l’homme, un grand pas pour les États-Unis ?

A quoi auraient ressemblé les États-Unis si la répression de Hoover n’avait pas enfermé dans des camps les protestataires ? C’est la question-tabou qui traverse le film.
Mais avant d’être le récit de la décadence liberticide qui a amené au Patrioct Act, J. Edgar est le déclin d’un homme aux commandes de l’État. A travers la diction des mémoires de J.Edgar, d’incessants retours vers le passé permettent de comprendre pourquoi Hoover est devenu l’homme le plus craint de toute une nation. Et ils se transforment rapidement en révélateur de vérité. En Wotan du XXIème siècle, Hoover tient tous les personnages dans ses mains. Clint Eastwood dévoile les usurpations, les erreurs et les abus de tout un système. Celui de la justice américaine. L’arrestation du célèbre criminel John Dillinger ou d’Alvin Karpis sont scénarisées.

Transporté par le jeu des acteurs

Comme dans le Crépuscule des Dieux, la paranoïa et la répression de Hoover ne feront que l’amener jusqu’à sa fin. Sans accrocs, les acteurs interprètent ses instants dramatiques de l’histoire avec un grand H.

Leonardo Dicaprio métamorphosé!

Avec son jeu entre l’admiration et la détestation, Naomi Watts propose une interprétation parfaite. La secrétaire soumise et déterminée est la clé des secrets d’état d’Hoover. Comme dans un labyrinthe sans fin, le spectateur se perd entre la fiction et la réalité, les mensonges et le double discours. Un film admirable qui donne à penser.

Secret de chambre

Clint Eastwood emporte son obsession du caché jusque dans la chambre à coucher. Pas celle de l’amante ou de la femme. Mais celle de la mère. L’interprétation du complexe d’œdipe version politique par une Jocaste authentique, Judi Dench, est excellente. Sans femme, reniant son homosexualité quitte à blesser l’amour de sa vie, le personnage de Leonardo Dicaprio se refuse à être lui-même. La scène du travestissement, réel hommage à Psychose, est ahurissante.

Un amour secret


« L’admiration de toute une nation n’est rien sans amour » confie une jeune actrice à J.Edgar. Un conseil dont le chef du FBI n’a que faire. Son patron préfère cacher sa vraie nature. A la manière d’un enquêteur, Clint Eastwood décortique les rares moments d’intimité entre J.Edgar Hoover et son bras droit, Clyve Tolson.  Les séquences d’intimité sont muettes, tout en retenue. Le spectateur ne peut que trembler en attendant qu’il se passe quelque chose.
Là où une psychanalyse aurait pu sauver l’affaire, Clint Eastwood renforce le brouillard autour des secrets de famille. Le spectateur ne peut s’empêcher, en sortant de ce film poignant, de se demander à quel point les États-Unis n’auraient pas été changés si ce névrosé avait assumé ses pulsions. J. Edgar n’a-t-il pas réprimé dans son pays tout ce que son esprit ne pouvait accepter en lui-même ?

Pauline Amiel et Sandra Cazenave

Quand la photo choque…

Des fois, les mots ne suffisent pas. Comme l’a dit Bourdieu, Le choc des images est nécessaire pour faire passer le message. Dans notre histoire, plusieurs photos ont traversé les continents pour marquer les esprits. Votre Martine sélectionne pour vous les plus sympas… Petit flash-back non-exhaustif, bien sur !

Bébé lost in translation

Nevermind de Nirvana

Nirvana. Que celui qui n’a pas kiffé Nevermind dans sa vie me jette la première pierre. Au delà de la musique et de l’esprit grunge de Kurt Cobain, c’est une des pochettes qui a marqué le monde de la musique. Un bébé amphibie, qui gambade dans l’eau. Mais pas seulement. Ce qui rend le gosse si joyeux et lui provoque une érection (si si les pros sont unanimes) c’est le billet vert. Accroché à un hameçon, le billet attire le bébé-nageur. Le message est clair : nous sommes tous, dés la naissance des êtres cupides. No future, on est tous pourri ! Freud s’est retourné dans sa tombe

Sucer tue ?

Une camapgne anti-tabac qui n'a pas fait long feu

Dix ans plus tard. Nirvana n’est plus mais le tabac est toujours un fléau chez les jeunes. La campagne anti-clopes a frappé les esprits. L’amalgame entre fellation et tabagie est certes obscur. Mais l’image parle d’elle-même. Cet ado, candide, aux regards doux estsoumis à des sévices sexuels par un adulte sans scrupules. Le pauvre fumeur VS l’industrie du tabac ? En tout cas, la campagne de pub ne laisse personne indifférente. Nadine Morano est la première à monter au créneau : « il y a d’autres moyens pour expliquer aux jeunes que la cigarette rend dépendant, au moment où on lutte contre la pédo-pornographie. » Les réprobations fusent… jusqu’à l’interdiction de la campagne !

Embrasser, c’est croire

Un grand classique...La pub Benetton

J’avoue, ça reste une de mes préférées. Que les croyants ne s’offusquent pas, ce n’est qu’un message d’amour ! Une none et un prêtre qui se roulent une galoche pareille, ça laisse rêveur. Sans vouloir remettre la grande question du mariage des prêtres sur le tapis, Benetton montre que l’amour, ça vaut mieux que la guerre !

Porno chic, ou pas…

Trop de choc tue le message. La pub Sisley

Ce qui est bien avec les photos chocs, c’est qu’elles portent un message au plus grand nombre. Quand c’est seulement pour vendre un produit, ça devient plus douteux. La fellation, le bondage et la soumission ne sont pas des arguments commerciaux ! Le corps de la femme doit être respecté par les publicitaires (ARPP, si tu m’entends…) Entre le porno chic et les suspicions d’abus sexuels, pour Terry Richardson, il n’y a qu’un pas !

Pauline Amiel

Un Saint vaut mieux que deux tu l’auras

Si – comme moi – vous faites une intoxication de bons sentiments et que vous ne pouvez plus piffrer l’esprit de noël, j’ai LA solution. Si les « Et bonne année surtout » vous rendent malade… faites une cure de sanquette avec Saint

Saint, c’est le film un peu stupide, un peu bravache et un peu sanguinolent. Celui qui n’a surement pas dû se retrouver sous les sapins en cette fin d’année. Pourtant, pour tous les amateurs de comédies d’épouvante, c’est le top.

Ouhhhh, le méchant Saint-Nicolas

Après la Nuit des loosers vivants (une bande d’has-been tente de ressusciter Kurt Cobain et se transforme en morts-vivants. Plutôt cool.) et Black sheep  (des moutons zombies qui attaquent la Nouvelle Zélande, ça vaut le détour aussi), c’est Saint Nicolas qui sort de sa tombe. Et massacre à grand coup de sceptre les petits Néerlandais pas sages. Accompagnés de ses Pères fouettards assoiffés d’hémoglobine, ils attaquent Amsterdam, la nuit du 5 décembre.

Cheval zombie, justice nulle part

Là où Saint-Nicolas passe, tout le monde trépasse. Et c’est pas peu dire. 15 morts selon la police, plus de 300 selon les organisateurs, les zombies sanctifiés bouffent une fois tous les 42 ans, alors, ils rentabilisent. Et pour aller plus vite dans le coupage de tête, Saint-Nicolas chevauche un superbe pur-sang blanc comme neige. Au début. Ce qui donne quelques scènes de course poursuite cheval-vs-voiture-de-flics-sur-les-toits-d’Amsterdam plutôt sympathiques. C’est le vrai héros de ce film. Mais rassurez-vous, le réalisateur a utilisé un cheval en mousse pour les cascades. Et ça se voit.

Noël, c’est la mort

Saint, c’est la solution anti-bûche de noël. Avec ses ados plus « biatches » que jamais, ses pulls léopard version décolleté plongeant et ses flics « plus nazes que ça, tu meurs », Saint nous remet sur le droit chemin. Petite mention spéciale pour les dialogues, particulièrement travaillés. Genre  « C’est sympa d’avoir des cadeaux mais des fois on se retrouve avec des trucs dont on avait pas besoin. » Le réalisateur avoue dans une interview s’être inspiré de Petit Ours Brun. 

En tout cas, 300 morts plus tard, on se sent mieux. La bûche et le homard sont digérés. On en veut presque plus à Tata Martha de s’être bourré la gueule et d’avoir vomi dans sa nouvelle paire de chaussures. Ni au cousin Martin qui a mis en boucle pendant trois jours Dora l’exploratrice. Saint, à mettre entre toutes les mains.

Pauline Amiel

Saint, sorti le 15 novembre, dvd aux alentours de 20 euros.

Edvard Munch, demain c’est aujourd’hui

Que devient la peinture, à l’ ère des images reproductibles ? Voilà une des questions majeures posée par les artistes du 20e siècle. Parmi eux, Paul Gauguin ou Vincent Van Gogh mais surtout Edvard Munch. Le peintre norvégien a abordé cette problématique avec une acuité déconcertante. Le Munch-museet d’Oslo prête jusqu’au 9 janvier, 140 de ses oeuvres au Centre Pompidou à Paris pour une exposition exceptionnelle et inédite en France. Plus qu’une dizaine de jours donc pour s’imprégner de l’univers de ce génie pré-expressionniste. Une bonne occasion de revenir sur l’oeuvre d’un peintre « habité ».

Le cri (1893) son chef d'oeuvre absent de l'exposition parisienne

Comment être considéré comme un artiste moderne à l’aube de 2012 en étant mort en 1944 ? Grâce à un supplément sensoriel dont quasiment personne n’est doté : le génie ! Lui, contrairement aux hommes passe le fil des décennies sans prendre une seule ride. Même en pleine lumière, certaines toiles (pas toutes) d’Edvard Munch laissent le spectateur stupéfait par leur fulgurante modernité.

L’art et l’image se mêlent

Peintre par vocation, Edvard Munch était photographe par passion. Il entretenait un dialogue permanent avec les formes de représentation les plus modernes. Une sélection de photos personnelles, surtout des autoportraits, témoigne de son irrésistible attirance pour la nouveauté. En 1927, en voyage à Paris, il s’offre une caméra pour amateur et filme ses impressions. Les bandes conservées à Oslo sont projetées en ce moment à Paris. L’artiste est parfaitement conscient de l’avenir et de l’impact de l’imagerie. Edvard Munch a compris que les nouvelles industries (alors) du cinéma, de la presse illustrée et de la carte postale avaient comme seule vocation d’introduire des formes de récit inédites dont l’art en général et lui en particulier devait tirer profit.

La noirceur tout en couleur

L’artiste scandinave a laissé à la postérité l’image d’un peintre solitaire et surtout

Autoportrait "à la Marat" (1908) réalisé pendant son internement à Copenhague

angoissé. Si l’on ouvre un livre sur l’histoire de l’art au chapitre Edvard Munch on apprend que son oeuvre est marquée par une rupture au début du XXe siècle : les traits se diluent, la couleur s’accentue. Mais que lui est-il arrivé? Les spécialistes s’accordent à dire que l’année 1908 et son séjour en clinique psychiatrique marque un tournant. Mais les causes de sa rupture nerveuse n’appartiennent qu’à lui. Cependant il dissémine des indices dans chacune de ses toiles. Aucun de ses modèles n’est rassurant ou stable.

L’ Homme névrosé en crise

Le noctambule

Le noctambule (1923-1924) inspiré de sa propre expérience

Il aimait peindre ce qui lui était familier : l’insomnie, la dispute, la violence occasionnelle, les coups de sang. Il mélangeait le noir et le gris à une palette presque aveuglante. Un flot de couleurs criardes mettent en abîme sa vision de la vie et de sa semence nourricière la passion jusqu’à la déraison. La meurtrière, Le noctambule ou encore Jalousie et La bagarre sont autant de témoignages de cette folie qui donne à l’existence tout son relief. Chacun de ses coups de pinceau jaune, pourpre ou violet est un reflet inconscient des tourments de sa propre âme. A mi-chemin entre la netteté de la conscience et le tourbillon de l’inconscience.

Ophélie Grosshans

Du fun, des faits et des formes

C’est LE cadeau de noël. Si vous n’avez pas encore fini vos achats à J-2, courrez dans la librairie la plus proche. Datavision est certes un livre mais il regroupe tablette, e-reader, web-docu et infographie.

L’info en images, c’est le crédo de David McCandless. Une donnée, un schéma. Voilà un résumé des 220 pages de Datavision. « Information is beautifull », c’est le slogan de son auteur, un journaliste qui a allié ses passions de l’écriture et du design dans ce petit bijou.

Destination finale

Imaginez, vous avez peur de l’avion. Hop, page 82, David McCandless détaille les sièges les moins risqués et les véhiculés les moins accidentogènes. Et le tout avec des schémas et des dessins.

Ses objectifs ? Systématiser l’information et rendre accessible les données les plus précieuses au plus grand nombre. Datavision, une autre manière de transmettre l’information, en datant et donnant les sources de toutes les données. David McCandless ne laisse rien au hasard. Comment la psychothérapie analyse ses patients,  les degrés d’intelligence, autant de questions qui nous intéressent et auxquels l’auteur n’épargne rien.

La nouvelle encyclopédie universelle du savoir relatif

Quand on vous dit qu’il y en a pour tous les goûts. Page 154, tous ceux qui assument mal les kilos pris pendant les fêtes trouveront un comparatif détaillé de tous les régimes en vogue. Page 122, les angoissés se rassureront en voyant le schéma des morts les plus probables. Les grunges trouveront une genre-ologie du rock, page 58. On ne va pas tous les faire mais chaque feuillet est une découverte.

David McCandless sait comment nous allons mourir!

Tous les domaines de culture générale sont écumés par l’auteur. Des poissons aux philosophies en passant par les partis politiques. Tout y est et en technicolor. C’est le cadeau parfait pour tous. A lire en famille, entre ami, seul. A feuilleter, à détailler, à abandonner et à utiliser pour ses cours ou son travail. Datavision, c’est le livre papier 2.0.

Pauline Amiel

Le cadeau musical

A l’heure où l’industrie du disque mord un peu plus la poussière, un cadeau musical pourrait bien faire l’affaire. Panorama des disques « offrables » selon les idéaux-types familiaux.

Tata Michèle, 54 ans, comptable:

photo fnac.fr

Adèle, 21 : sobre, veloutée. Dans les Charts depuis… on ne compte même plus (elle a quand même battu le record de Michael Jackson et AC/DC !). Adèle, c’est un peu comme un manteau d’hiver, lourd et chaud, posé sur nos épaules. En cette saison, c’est idéal. Si Michèle aime se faire un petit pétard le samedi soir, ne pas hésiter à s’orienter vers Amy Winehouse, Body and Soul. Album posthume intéressant, mais n’égalant pas Back to black.

Le cadet Kewan ou Erwan ou Deltaplane on ne sait plus, 11 ans:

photo : lafouineofficiel.skyrock.com

La fouine, Capitale du Crime 3. Je crois que tout est dans le titre. Un rap un peu bourrin, franc du collier et vulgaire à souhait. Il a le mérite d’aborder des sujets très ancrés dans l’actualité. Attention aux oreilles chastes… S’il préfère un rap intelligent, Watch the Throne des deux meilleurs rappeurs US du moment (Kayne West & Jay-Z) est un bijou. Et si Deltaplane est la cadette, tapez plutôt du côté d’Amel Bent, Délit mineur. Même si l’album reste très superficiel en terme de production musical R’n’B, l’ex-nouvelle star a su s’entourer de plumes reconnues (Goldman, Leforestier…) et s’est même essayée à l’écriture sans avoir à rougir.

Oncle Fred, 35 ans, célibataire endurci:

photo : zikeo.com

Noir désir, Soyons désinvoltes n’ayons l’air de rien. Évidemment. Comment passer à côté de l’anthologie… Et puis ce sera l’occasion de le lancer entre la dinde et la bûche sur : « Cantat au fond, il a pas mauvais fond,… au fond… ». Au fond du fond, il reste Noir dés’ qui s’éteint, c’est tout de même une page musicale et générationnelle qui se tourne.

Jessica, 17 ans, n’est plus vierge depuis longtemps:

Photo : DDU pour deezer.fr

Rihanna, Talk That Talk. Pour ne pas se faire oublier la pulpeuse bimbo américaine aux cheveux tantôt rouge, tantôt violine, tantôt cendré (c’est une couleur, si si !), est parvenue à sortir deux albums en moins de douze mois. Un record ! Gros son électro/dance à la Guetta. La peste « Jess » dansera sur son lit, les basses gonflées à bloc, tout en étirant son chewing-gum le plus loin possible de sa bouche avec son doigt au vernis tantôt rouge, tantôt violine, tantôt cendré…

Papa Jean-Claude, 52 ans:

Photo : virginmega

Post-68ard, il faut pour Jean-Claude LA compil’. Mais pas n’importe laquelle. Celle de Gérard Lenorman et son album de reprises duettistes : Duos de mes chansons. Entre La ballade des gens heureux, Quand je serai Président de la République et Voici les clés (des chansons tellllllement engagées !), JiCi partira dans un flash-back-trip pour évoquer entre deux tranches de saumon fumé, le temps de sa jeunesse houleuse, qui était tout de même « vachement mieux avant… »

Cousin Nico, 24 ans:

Photo : cdiscount.com

 Christophe Willem, Prismophonic. Convient à toute personne ayant une furieuse envie de « mouver » son corps sur une musique sans lendemain mais qui reste tatillon sur la maîtrise vocale du chanteur. Allez savoir d’où lui vient ce tic… ? Chistophe Willem signe le troisième et dernier volet de ses albums électro, avant de se lancer dans d’autres aventures musicales. Certains parlent d’apothéose. Si Nico n’a pas le diable au corps, et qu’il aime regarder Taratata, tentez plutôt un petit Charlie Winston, millésime 2011, Running Still. Ca glissera tout seul telle une liqueur de poire après le frugal repas de noël de mamie.

Si le CD est mort, la musique ne l’est pas…

Bonnes fêtes à toutes et tous !

Un pavé contre le Bloc

Le Bloc, c’est d’abord une claque. Oui, ce roman de société est sorti y a presque deux mois, oui il a obtenu quatre pages dans Marianne, oui il est sélectionné dans les finalistes du prix Flore. Mais il faut l’avouer : s’il y a UN livre à commander à noël, c’est celui-là.

Le Bloc, une fiction contre les extrêmes

Des émeutes en France. Quasiment 700 morts. Elections anticipées. Le parti d’extrême droite, le Bloc Patriotique négocie dix ministères avec le pouvoir en place. Dans cette nuit parisienne où tout se joue, Antoine fume, sniffe et boit. Intimement lié avec le narrateur qui le tutoies, il revient sur sa vie depuis ses début de petit ado extrémiste. « Finalement, tu es devenu fasciste à cause d’un sexe de fille. »

Même nuit, toujours à Paris. Stanko, la force brute, l’homme de main du Bloc. Il est pourchassé par les hommes qu’il a formé. Pour obtenir ses dix ministères, le Bloc doit sacrifier Stanko. Son enfant fou, toute sa part d’ombre.

Chassé-croisé sur fond de violence

L’histoire du Bloc nous touche tous. Pas de haine du fasciste. Jérôme Leroy fait vivre des personnages particulièrement humains qui sont extrémistes parce qu’ils y croient, parce qu’il faut bien se rattacher à quelque chose. C’est ce gouffre qui est le plus terrifiant. Pourquoi devient-on fasciste ?

Une histoire de la violence. Stanko, c’est le gosse du Nord désindustrialisé, de la misère sentimentale. L’enfant qui a au fond de lui une brutalité qui le détruit. Sur son chemin, Antoine. Intelligent, il s’ennuie dans son adolescence. Mais ils partagent cette rage et ce besoin d’abîmer, de cogner.

Jérôme Leroy relate ce futur imaginable avec douceur et poésie. Juste assez pour rendre son histoire plus inquiétante.

Pauline Amiel

NB : Le Bloc, 16,50 euros.

L’homme aux paradoxes

« J’en ai marre de rouler en 2 CV, je veux rouler en Rolls ». Il y a des personnalités sur qui on pense tout connaître. Au royaume des apparences, Serge Gainsbourg était le prince. Son visage marqué par les excès, ses provocations et bien sur ses chansons éternellement actuelles. Mais tout cela n’est que la partie émergée de l’iceberg. Gainsbourg, c’est sur n’était pas un ange. Mais on ne naît pas provocateur.

Serge Gainsbourg on le sait adorait mettre du poil à gratter dans le dos de la vieille France. Lorsqu’en 1979, il sort Aux armes etc.. , La Marseillaise en version reggae, c’est une bombe. Fustigé par la presse de droite qui crie au sacrilège, il se défend en arguant que le reggae est une musique révolutionnaire qui sert un chant révolutionnaire. Il connaît un gros succès populaire. Sa chanson est considérée comme un geste politique qui séduit la jeunesse. Il se fait des ennemis aussi. Le harcèlement commence. Le 4 janvier 1980, un groupe d’extrême droite tente d’ annuler son concert à Strasbourg, ou plus qu’ailleurs l’hymne nationale rythmée par une musique de « noirs » fait tâche. Les bérets rouges empêchent les musiciens jamaïquains qui l’accompagnent d’ entrer sur scène. Gainsbourg monte seul et chante La Marseillaise le poing levé. Comble de l’ironie, les paras sont contraints à se mettre au garde à vous dès les premières notes. Le lendemain, le Journal du Dimanche en fait sa Une. Il était une célébrité, à 50 ans, il devient une superstar.
Son but est atteint. Mais d’où lui vient ce besoin?

La "tête de chou", Gainsbourg ou Gainsbarre ?

Il rêvait d’être peintre

Prodige, il l’a d’abord été en peinture. C’est en fréquentant Salvador Dali qu’il découvre le luxe et le pouvoir de l’argent. Il se met à rêver de gloire, mais ne parvient pas à vendre suffisamment de toiles. Le contexte le pousse à devenir musicien malgré lui. Il se met alors à jouer du piano dans un cabaret pour travestis. Petit à petit il se fait un nom. Il écrit pour Juliette Gréco et décide de devenir chanteur. Entier, il renonce à la peinture. Pour mettre un point final à cette phase de sa vie, il met le feu à tous ses tableaux.

Un enfant face à la haine

Enfant, il a connu l’infamie de l’étoile jaune. Né en 1928 de parents russes qui ont fuit la révolution bolchevique, il vit à Paris au rythme du piano de son père. A l’époque, Serge Gainsbourg, s’appelle Lucien Ginsburg il est un enfant sage, timide. Sa vie bascule en juillet 1940 lorsque la Wehrmacht défile dans les rues de la Capitale et instaure de nouvelles lois antisémites. C’est alors, adolescent qu’il se met à détester son apparence. Son nez caractéristique et ses oreilles décollées sont une caricature du juif. Écrasée par l’humiliation et la misère, la famille trouve refuge à Limoges en zone libre où elle vit avec un faux nom et la peur d’être prise. Tout le reste de sa vie, il s’est considéré comme un rescapé.

Une laideur irrésistible

Serge Gainsbourg a du succès auprès des femmes. Taxé de laid, il séduit quand même celle qui était considérée comme la plus belle femme du monde. Ses atouts : sa passion, son talent, son humour. Il sait se mettre en valeur. « Je vais et je viens entre tes reins ». Serge Gainsbourg est un homme qui a fait l’amour en studio avec Brigitte Bardot et qui en a fabriqué un disque, un tube Je t’aime, moi non plus. Plus tard, il fait la connaissance de Jane Birkin sur le tournage de son premier film Slogan. Ensemble ils incarnent un couple médiatique et sulfureux.

Une fausse vedette

Ces 4 premiers albums sont des bides. Les gens reconnaissent sa « tête de choux » dans la rue, mais il vend très peu de disques. Après Je t’aime moi non plus sortie en 1967, aucun de ses titres n’est entré au hit parade. Ses chansons ne passent même pas à la radio. Son impertinence effraie. Son salut, il le trouve dans la provocation. Il sort l’album Aux armes et caetera enregistré à Kingston. L’heure de la consécration a sonné. Gainsbourg devient Gainsbarre. Il brûle un billet de 500F lors de l’émission 7 sur 7. Sous l’emprise de l’alcool, il peine à articuler lors de ses interviews. Il sombre dans la décadence: le prix de la gloire.

Les mélodies de Gainsbourg sont aujourd’hui reprises dans le monde entier.
Serge Gainsbourg avait tout, sauf la capacité d’en jouir.

Ophélie Grosshans

Ouvrez vos chakras, vous êtes au yoga

Besoin de soleil, de cocotier et d’un bon massage ? Envie d’être mince et musclée sans faire d’effort ? Si comme moi, vous n’avez toujours pas gagné au loto et que vous êtes un procrastinateur-né , foncez au yoga.

Fesses en arrière, mains sur le sol, tête en l’air. « On inspire et on laisse la respiration caresser notre colonne vertébrale » Non, ce n’est pas une nouvelle position, mais les astuces et les postures « bien-être » du yoga. Du haut de sa soixantaine, cheveux poivre et sel et vêtu d’un jogging de compétition, Claude Girard a tout de la version humaine de maître Yoda. Tel le petit homme vert, ce professeur émérite de Hatha Yoga prodigue des préceptes pour se sentir bien dans son esprit. Mais aussi dans son corps. « Une pratique régulière permet d’améliorer vos fonctions cardio-vasculaires, tout en favorisant la circulation sanguine. » confie le professeur.

Le yoga, la messe des gens stressés

Pour beaucoup, le yoga revêt les aspects d’une secte. Oui, il est vrai « la salutation au soleil » et le shanti (« bonjour en indien ») sont récités lors de chaque cours, comme une prière. Oui, les yogis suivent les préceptes du Dieu du Hatha Yoga, Svātmārāma, un yogi indien du xve siècle. Oui, ces principes sont transmis dans un lieu de culte. Souvent une salle de karaté, de fitness ou pour les VIP sur la plage. Oui, les bergers qui guident les élèves sont nombreux. N’oublions pas que le yoga , ça rapporte (en moyenne 15 euros la séance). La doctrine, les serviteurs et l’argent transformeraient presque le yoga en secte. Mais comment se méfier d’un adepte de la salutation au soleil, qui vous dit que vos postures « sont magnifiques » alors que vous avez la tête entre les jambes ?

Les adeptes suivent les faits et gestes de Claude.

Peace and yoga

Avant tout, le yoga est un mouvement pacifique, un héritier de mai 68. « La non violence envers le corps » est enseigné, comme l’explique le sage Wikipedia. Alors on accepte le thé que Claude nous met entre les mains et on ne se fait pas prier pour mixer la position du singe, du guetteur et de la table. Et surtout on oublie pas de souffler. Car c’est ça le yoga, 50 % du cours à respirer. Alors si vous êtes débordé, si votre petit(e) ami(e) vous prend la tête ou que vous en avez marre de travailler, allez y faire un tour. Ca coûte toujours moins cher qu’une razzia dans les magasins.

Sandra Cazenave